Défouloir, Ruminations

POURQUOI J’AI ENVIE DE FAIRE CACA SUR TOUS LES BULLET JOURNALS DE LA TERRE (alors que j’en possède un)?

Première étape : comment tout a commencé, pourquoi tant de haine?

Ce qui a tout déclenché, c’est la vidéo de la You Tubeuse Esther, intitulée « Où trouver le temps sans se lever à 5 heures du mat? ». Quand j’ai vu le titre, mon cœur a fait « boum boum » dans ma poitrine : peut-être avait elle une solution, pour ENFIN ne pas être totalement dépassée par les corvées du quotidien? ( Je sais je lui en demande beaucoup la pauvre.) Pour ceux qui ne la connaissent pas, c’est une vidéaste qui parle de développement personnel. Ne me demandez pas pourquoi, mais je l’aime bien, alors que les thèmes qu’elle traite ne sont à priori pas mon dada. ( le tiercé c’est pas mon dada non plus).

Bref. J’étais assise en pyjama, posée sur mon canapé comme un vieux sac, quand j’ai regardé sa vidéo. Esther y calcule le temps qu’il nous reste dans notre journée après avoir travaillé, mangé, dormi, pris les transports… Et le constat final fait mal au fion : en fait, il ne nous reste que 5 heures par jour pour faire ce dont on a vraiment envie, tout au fond de son âme ( aller au cinéma, boire des bières, voir des potes, avoir une vie sexuelle, lire, faire du saut à l’élastique, se reposer…). Certains diront qu’elle enfonce des portes ouvertes, mais avec ce calcul tout con, Esther m’a fait prendre pleinement conscience de la raison pour laquelle on en chie au quotidien : le manque de temps LIBRE. (Ok dans cet article, je découvre la vie, un peu comme ceux qui viennent de comprendre  que Macron est le frère caché de Nicolas Sarkosy).

En vrai, je suis pire…

Evidemment, ces 5 heures sont à débattre pour ceux et celles qui ont des enfants, ceux qui vivent de leur passion, les riches rentiers qui ne bossent pas ( je les envie et je les déteste en même temps, parce que j’adore critiquer les gens très riches), les chômeurs qui stressent de ne pas trouver un travail, et j’en oublie encore…

Mais c’est la triste réalité pour une personne sans gosses, citadine, qui trime environ 40 heures par semaine. Comme MOI en fait.

Le problème, c’est que notre journée de 24 heures se divise en environ trois temps :

  • 10 ou 11 heures pour faire des trucs obligatoires physiologiquement, sinon on meurt ( genre manger et dormir),
  • 9 heures pour bosser et faire le trajet aller-retour qui va avec,
  • 5 heures pour le reste.

Dans la suite de la vidéo, elle nous explique que si on veut améliorer sa vie, il faut utiliser ces cinq heures restantes par jour pour… AGIR. Sur le papier, c’est vrai qu’elle a raison, qu’il faut se bouger le cul et qu’on n’a rien sans rien. Sauf, que pour moi… c’est pas possible.

Deuxième étape : je fais mon coming-out en avouant ma paresse maladive.

En fait, le problème, c’est que j’ai un besoin viscéral de glander et cela depuis toujours.

1-  En effet, la glande me permet de « compenser » tous les moments où je ne suis pas libre : j’aime bien mon travail mais à choisir, je ne me lèverais pas tous les jours à 6 heures du matin pour y aller, je ne passerais pas autant de temps dans des transports bondés et je choisirais d’autres collègues ( que l’on doit supporter eux et leur être tout entier). Donc, j’ai besoin d’un temps de repos pour me remettre psychologiquement de toutes ces contraintes subies dans la journée ( pauvre chou).

2- C’est aussi une forme de résistance (passive bien sûr, faut pas trop en demander) contre cette injonction à la productivité, omniprésente dans notre société et qui nous pourrit la vie jusque dans nos loisirs. J’ai l’impression d’être un putain de robot qui doit pouvoir tout faire : aller au taf, avoir une vie sociale et amoureuse, faire du sport, bien manger, me cultiver, avoir une maison impeccable, voyager… C’est dur d’avouer en société qu’on a passé son week-end à regarder des rediffusions de « Faites entrer l’accusé » ( pour moi, c’est le bonheur absolu).

Troisième étape : le bullet journal (le bujo pour les intimes) devient le bouc émissaire de tout ce qui ne va pas dans le monde.

Le pauvre, il n’a rien fait à part exister, mais il fallait bien que ma frustration tombe sur quelqu’un ou quelque chose. Donc, c’est ce putain de « super agenda » pour les pros de l’organisation qui va prendre.

En fait, le bullet journal, c’est vraiment le suppôt de Satan, parce qu’il vous fait croire qu’il va vous aider à faire un truc impossible : avoir plus de temps libre dans votre journée. Le problème, c’est que même en étant super bien organisée, je n’aurais pas plus de CINQ heures RIEN QUE POUR MOI ( à moins d’arrêter de bosser, d’arrêter de dormir ou de trouver un retouneur de temps comme Hermione Granger).

Mais c’est pas grave, on vous laisse penser qu’en écrivant toutes les merdes que vous avez à faire dans votre bullet journal, l’espace temps va se dilater et vous offrir un sursis supplémentaire avant de retourner au travail. C’est vraiment du foutage de gueule, car cela vous forcera peut être à optimiser vos heures de liberté ( la fameuse optimisation) , mais cela ne vous en donnera pas plus.

En plus, il faut rajouter à cela, les heures que certaines personnes passent à personnaliser elles mêmes, leurs propres rubriques dans leur bujo. Mais putain, comment vous trouvez le temps de pondre un truc aussi magnifique, pratique et superbement illustré? Personnellement, j’ai l’impression que ces personnes n’existent pas en vrai, à part sur You Tube et sur Instagram. Mais peut être que je dis ça par jalousie, car je suis incapable de faire un truc aussi joli que ce que je vois défiler sur le web.

A une époque, j’ai cru à toutes ces foutaises et j’étais devenue une esclave de mon « super agenda », qui ne me quittait pas d’une semelle, comme la merde au cul d’une vache. Le but de ma journée se réduisait à cocher des cases : j’éprouvais un sentiment de satisfaction pitoyable, lorsque je pouvais enfin rayer de ma liste, une merde tâche que j’avais notée.

Le hic, c’est que je me rends compte que j’étais vachement plus heureuse à l’époque où je n’en avais pas… alors que j’avais tout autant de choses à gérer qu’aujourd’hui. Voilà pourquoi j’en arrive à avoir envie de faire caca sur tous les bullet journal du monde entier alors que j’en ai un. J’ai l’impression que cela me pourrit la vie plus que cela ne me l’améliore. C’est la pire arnaque de l’univers, qui matérialise un énorme fléau de notre société moderne : celui de devoir gérer sa vie perso comme on gérerait une entreprise, avec des impératifs de productivité, d’optimisation du temps et des moyens, des objectifs et des résultats. J’en ai la gerbe rien que d’y penser.

Quatrième étape : Vais-je me réconcilier avec mon bullet journal?

Je vais continuer à noter quelques objectifs à réaliser sur l’année, cela me fait plaisir ( même si je me mens à moi même et que je sais que cela n’est pas vraiment efficace). Mais confidences pour confidences, je suis en train de retourner à l’agenda traditionnel, celui qui me servait à me rappeler mes rendez-vous chez la gynéco et l’anniversaire de ma tante. Je vais arrêter d’écrire chaque petit geste quotidien que j’ai à faire et que je ne risque pas d’oublier ( du style faire les courses et payer mon loyer, comme si j’avais besoin d’écrire des trucs aussi évidents). J’ai stoppé les trackers avec soulagement ( qui est assez fou pour se traquer soi même, je vous le demande). Cela va sûrement m’aider à péter un coup et à détendre un peu la ficelle de mon string. Ou peut être vais-je revenir vers mon bujo en rampant et en m’excusant dans quelques semaines, qui sait?

De toute façon, j’ai passé mon week-end en pyjama, sans avoir coché les trois quarts des trucs que j’avais prévus de faire et que j’avais religieusement consignés dans mon bullet journal ( du genre aller au sport, voir une expo…). Et vous savez quoi? Je m’en tape complètement alors qu’il y a quelques temps, je me serais auto-flagellée de m’être laissé aller de la sorte. Aux chiottes le bujo ( ce cri de fin est vraiment naze, please don’t judge me)!

C’est ici que je vous quitte!

Bisous!

PS : bullet journal, ça prend un « s » au pluriel?

 

 

4 thoughts on “POURQUOI J’AI ENVIE DE FAIRE CACA SUR TOUS LES BULLET JOURNALS DE LA TERRE (alors que j’en possède un)?

  1. Mais comment je te rejoins trop ! Je n’ai pas de bujo… mais des gens sur IG oui, et perso je n’ai pas le temps de faire la moitié du quart de ce qu’elles font. Donc bon le bujo c’est caca mais IG n’aide pas non plus ! Quand je regarde les photos et les stories, les gens font 1000 trucs dans la même journée. Perso, après mettre levée à 6h, arrivée à 7h45 au taf, fait mes 7h30 de taf et avoir la « chance » de finir à 16h (je n’ai pas de grosse pause repas, juste 30 minutes et je mange derrière mon ordi), rentrée chez moi à 17h15 (je suis à 30 bornes de chez moi mais je me tape les bouchons du soir, j’adore) et bien il me reste aussi 5h de temps pour moi car je me couche à 22h ou sinon je n’arrive pas à me lever le lendemain. Mais genre 5h de temps pour moi, ou pas en faite ! Hein par ce que les courses, le ménage, la lessive, la bouffe… J’appelle pas ça du temps pour moi ! Lire, peindre, créer, boire du thé, jouer à la console, mater mes séries (je suis en retard sur toutes), ça j’appelle ça du temps pour moi ! Du coup, y’a des jours j’ai juste l’impression d’être en mode « métro boulot dodo » et pire quand je vois les gens sur IG avec leur journée bien rempli de trucs cool… Bref, un pavé pour dire que tin’ ça fait plaisir de lire quelqu’un qui a le même ressenti que moi !

  2. Mais tellement Jenny! Y’a des périodes où je me « force » à sortir et voir des gens après le boulot sinon ma vie ne se résumerait qu’à ça ( et à faire le ménage, les courses et les papiers aussi…).
    En parlant des comptes Instagram de certains influenceurs qui peuvent vite devenir hyper culpabilisant ( en gros on se sent merdique à côté car notre vie est nettement moins « cool »), j’ai lu l’article publié sur le blog de La lune mauve https://lalunemauve.fr/liberees-titiou-lecoq-livre-feminisme-injonctions-bloguesques/
    Je l’ai trouvé intéressant et les commentaires qui suivent le sont aussi!

    Mes vacances arrivent bientôt je vais pouvoir lever le pied, j’espère que pour toi aussi!

  3. Perso quand j’ai du temps (entre le taf en horaires décalés, le môme et la casba), je peux rien faire par flemme. J’ai toujours mieux à faire, style glander. Ou prendre un bain pendant un siècle. C’est bien ça aussi, les bains.

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